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Demain il pleuvra
Sur les manifestants.es
Black Lives Matter
- Mathilde Fauve
Y : Animal crossing ? C'est quoi ?
M : C'est un jeu.
Y : est ce que c'est un jeu où chaque fois qu'on voit un animal on dessine une petite croix dessus ?
Sauf s'il y a déjà une petite croix ?
M : *ouvre de grands yeux incrédules* .... non....
Y : Ah non ! Je sais ! C'est un jeu où tout le monde se déguise en animal et court un cross. Comme le cross du collège, mais mélangé avec le carnaval un peu ! C'est ça ?
M : *éclate de rire* oui, c'est exactement ça !
Brèves de dialogues entre Y et M, 18/05/2020
Mat Fauve
Comment planter un fanal sur les flots d’une rivière au galop ?
Les drapeaux claquent sous le souffle des rancœurs
aux frontispices marmoréens des châteaux
mais aucun d’eux ne porte ta marque.
Et pourquoi chercher des repères
dans les constellations qui bordent ses paupières ?
La voie est intérieure
La vérité aussi, d’ailleurs.
Pourquoi ces éclaboussures de désir
Pourquoi ces projections absurdes
d’émotions et d’intentions
de gestes et de non-dits
dans le sillage de tous ceux qui t’entourent ?
Ne sais-tu pas
que rien ne peut changer une alouette en pierre ?
Ni imprécations, ni chantage, ni prière ?
Que le fleuve coulera vers la mer
quoique tu fasses pour le détourner
de sa destination première ?
Ne comprends-tu pas
que les chats sont libres
que le vent est fou
qu’ondulent les dunes
que les nuages peuvent mille fois
se transformer
jamais
ils ne deviendront un confortable édredon
malgré tous les retapissages des avions ?
Ne vois-tu pas
qu’un arbre est un arbre
Et non le pivot du monde
Ni même un confident
amical et discret
épanchant calme et stabilité
offrant un havre bienveillant
à ton radeau en déroute
à l’abri de la furie qui t’habite
des cyclones qui te dévastent
du maelström des doutes
menaçant de t’engloutir
tel un rafiot à la dérive
sur la langue gloutonne d’un trou noir ?
Alors arrête, je t’en prie
Arrête de te torturer ainsi
Arrête de vouloir mettre le vent en cage
le soleil en bouteille
et les gens dans des cases
Arrête de chercher midi au fond d’un puits
et quatorze heures à l’aurore
l’ivresse des cimes au relief d’une virgule
la bravoure qui te fait défaut dans la légèreté des bulles
Arrête de te triturer les méninges
dans un ballet de bouts de ficelle
comme un Gepetto à manivelle.
Arrête de courir sans cesse
après les comètes de tes promesses
que tu trahis sans réfléchir
pour te lancer sur de fausses pistes.
Arrête un instant, s’il-te-plait
Fais taire la machine à souhaits.
Fabrique toi une petite coquille
un labyrinthe, une cachette,
et tandis que tu te recroquevilles
soulage le poids de ta tête.
Lâche ton armure, ton épée et tes gants
Dénoue ta chevelure, ôte tes vêtements
Époussète ton passé, éloigne les remontrances
Dépouille toi de qui tu étais
Renie tes appartenances
Et pardonne toi d’exister
telle que tu es, rien de plus.
Retourne à toi-même
Explore ton âme
Retrouve les trésors abandonnés
enfouis sous la fange et les débris
des désastres operculés
des lâchetés et des oublis.
Suis la boussole et les sentiers
des éclats de rire de ton enfance
des éblouissements crépusculaires
la frénésie salvatrice de la danse
le repos bienfaisant de l’hiver
la fragilité des dentelles de glace
l’éternité mouvante de la mer
la gourmandise rouge des pralines
le silence apaisant des monastères
le soulagement du corps dans l’effort
et, au petit matin, la lumière opaline
de la rosée sur les cerisiers en fleurs.
— Mat Fauve
Encore une fois
Inonder la cavité buccale
Avec de l’eau bouillante
Comme des fantassins moyenâgeux
A travers les brèches de l’aurore
Il s’agit de noyer les assaillants noctambules
Attardés sur la pointe de la langue
Là où dansaient les rêves
Dans leurs tutus acidulés de mousseline
Comme des cheesecakes en ballerines
agitant leurs ailes et leurs crinières de tulle
Fondre dans la saveur de leurs pirouettes
Et de leurs sauts périlleux
que l’on contemple avec l’effroi superstitieux
d’une brisure ou d’un chute
quand seuls les rires volent aux éclats
et se fracassent contre les parois de nacre
Leurs acrobaties rebondissent
telles des bulles arc-en-ciel
dont les reflets tourmalins s’entremêlent
et tournoient en corolles
sous la caresse lutinesque
au rythme hypnotisant
de l’orchestre dantesque
au bal des ardents.
Après toute cette splendeur
Après tant de majesté
de fantaisies chimériques
il faut se résigner
à la cour des miracles
à l’hécatombe du réel
le cœur dans la poussière
la gravité sur les épaules
le regard mécanique
sous la félicité narquoise des panneaux publicitaires
qui vendent des rêves bien terre-à-terre
gardons aux coins de nos paupières
les paillettes opalines de nos chavirées lunaires
— Mat Fauve
Eclairs et coups de tonnerre Explosent comme boulets de canon Les oiseaux fuient le front De je ne sais quelle guerre Les enfants sursautent Les adultes rient fort La fenêtre est ouverte L’inquiétude reste au bord L’excitation des feux d’artifice Le plaisir des bulles et des ronds dans l’eau La fraîcheur soudaine des gouttes salvatrices ôtent au mois d’août sa moiteur de tombeau Ainsi, d’une journée condamnée à l’ennui D’un ciel bleu immaculé, d’une joie morne en cage L’orage change en fête miraculeuse et sauvage La torpeur estivale par la grâce de la pluie. — Mat Fauve
Un tout petit peu
de malheur dans l’amertume
du thé ce matin
— Mat Fauve
J’ai jeté un caillou à la rivière, hier
Je l’ai jeté du haut d’un pont
dans les remous écumants du courant
J’ai bien observé sa chute et son impact
Je voulais graver dans ma tête
ce mouvement, ce lâcher-prise
cette disparition subaquatique,
imaginer son chemin roulé par les eaux.
Le caillou était vert,
vert rainé de blanc
comme une balafre brillante
dans le vert de l’espoir.
Il était beau, ce caillou !
J’aurais aimé pouvoir le ramener chez moi
Le poser avec les autres sur le meuble en bois
pour pouvoir le regarder et le toucher de temps en temps…
Mais non, je l’ai jeté à la rivière.
Je ne voulais pas, mais il le fallait
on ne peut pas aimer un caillou à sens unique
il se serait ennuyé sur mon étagère
j’ai préféré lui rendre sa liberté,
et même, lui offrir des aventures,
lui qui était immobile sur le goudron
à prendre la poussière des âges.
Je lui ai offert le tumulte du voyage
la caresse, la force et la poussée des flots
les raclements sur le fond de la rivière
la rencontre des graviers et des pierres
comme lui emportées, comme lui, en sousnage,
et peut être même, la mer,
tout au bout
la beauté de la mer
la délivrance de la mer
l’immensité de la mer…
J’ai offert la liberté à ce caillou
que j’aimais
je l’ai laissé partir sans espoir de le revoir.
(Que pouvais-je faire d’autre?)
J’ai bien observé sa chute et sa disparition
Je lui ai crié AU REVOIR !
Je suis restée longtemps immobile sur ce pont
et l’eau recouvrait tout sur son passage.
— Mat Fauve
Gâteaux en miettes
Les picorer ensemble
un jeu entre nous.
— Mat Fauve
Sur le tapis sombre
de l’automne, l’élégance
des amanites.
— Mat Fauve
Ce soir, chez mon père
omelette aux champignons
cueillis du matin
— Mat Fauve
Seule sous ma couette,
le froid du ciel se reflète sur mon cœur
bleu aussi.
— Mat Fauve